
Pour la énième fois, celui que l'on surnommait le Borgne se frotta rudement les côtes pour lutter contre le froid. Il s'était emmitouflé dans un épais manteau mais cela ne suffisait plus. Les températures étaient si basses que le froid transperçait n'importe quel type de fourrure et gelait la moindre de ses articulations. Il devrait s'y faire, car ce n'était pour lui que le commencement de cette campagne russe.
Il décida de se lever pour inspecter l'installation de ses hommes. On lui avait rapporté plusieurs décès suite à une fièvre ainsi que de nombreux cas de gelures. Il avait ordonné à chacun de creuser à même la neige un abri de fortune pour se protéger du vent et de se serrer le plus possible. Les rations de vodka avaient été doublées. Le Borgne faisait en sorte que chacun de ses hommes se sentent soutenus par leur officier. Pour le moment, ils ne pouvaient faire qu'attendre et observer les premières maisons ainsi que la silhouette massive du Palais du Tsar qui se détachait au loin.
Le Borgne était de ses hommes dont le passé était un mystère, une histoire complexe dont les origines pouvaient paraître déconnectées du contexte actuel. D'allure noble et grave, le crâne rasé, cet officier avait un signe bien particulier : il cachait son oeil gauche d'un large bandeau noir. Enfin, son léger accent français lorsqu'il parlait russe pouvait trahir ses origines. Cependant, aucun de ses hommes ne connaissait son passé, ni les motivations qui l'avaient amenées ici, en terre russe.
Le Borgne continua sa promenade, suivi à quelques mètres d'un groupe de soldats pour sa sécurité personnelle. La neige et le vent s'étaient calmés et l'on pouvait profiter en ce début d'après-midi d'un soleil éblouissant qui se réfléchissait intensément sur le sol glacé. Il voulait en savoir de ce qu'il e serait du futur assaut, glaner des informations utiles, saisir les dernières nouvelles. Il marchait donc au milieu des bivouacs, observant d'un regard précis chaque détail, chaque visage, les gravant dans sa tête. Il avait toujours fait ainsi : s'imprégner de l'atmosphère, sentir au plus profond de lui les particularités du terrain.
Un bruit sourd de canonnade se fit entendre, suivi d'une riposte sporadique de coups de feu. Au loin, dans cette ville dont il ne se rappelait plus le nom, les français défendaient résolument chaque pâté de maisons. Le Borgne sourit froidement. La bataille promettait d'être intéressante.
Anim Seigneur :
Ménage fait ! Félicitation de l'iniative Le Borgne !