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L’aube en ce 2 Décembre très lentement se lève,
Laiteuse d’un brouillard qui cache les vallons.
L’armée Française est prête .L’attente enfin s’achève,
Il est passé sept heures. On entend les canons
De Davout, isolé, qui crachent leur mitraille.
Napoléon, au nord, du tertre de Zuran,
D’où il peut dominer tout le champ de bataille,
Fait dire à Soult, au centre, que pour l’heure on attend.
Du plateau de Pratzen continuent à descendre
Russes et Autrichiens qui poussent les Français
Trois fois plus faibles en nombre et cherchent à les prendre
A revers. On se bat... bosquets après fossés.
De village en village les Français se retirent
Mais pour ces gaillards là on s’accroche ou l’on meurt!
A couvert ils se mettent, ils arment, visent et tirent;
Et, la culasse vide, ils chargent avec fureur.
Baïonnettes en avant, d’un brusque coup d’épaule
Ils projettent la lame qui pénètre en chuintant...
Les Colins, les Thomas excellent dans leur rôle,
Habitués à manier leur fourche de paysan.
On recule, et il faut repasser la rivière,
Celle qu’on traversa hier avec entrain.
Sur la berge gelée on se rue vers l’arrière
Où la réserve attend :.Davout lève la main:
Trente canons de bronze se mettent de la fête.
Ils tirent sur l’autre rive, ils tirent à bout portant,
Fauchant mortellement; et dans cette tempête
Tombent, l’un après l’autre, les uniformes blancs...
L’offensive s’enlise .L’Autrichien se retire.
C’est maintenant au nord que se joue la bataille.
Du tertre de Zuran Napoléon admire
Les grenadiers de Lannes, stoïques, qui, vaille que vaille,
En bataillons serrés, progressent sur la route
Pour affronter les Russes du prince Bagration.
Les voilà au contact; il faut, coûte que coûte,
Empêcher l’ennemi de faire la jonction
Avec ceux du Pratzen Le combat est farouche;
Souvent au corps à corps. De haie en boqueteau
Par bonds chacun progresse et, sous les balles, se couche
Avant de repartir à l’assaut du coteau...
L’action est indécise et les Français piétinent..
Malgré tout leur courage les hommes d’Oudinot,
Grenadiers de légende, que le devoir anime,
Reculent face au nombre. Mais l’Empereur aussitôt
Il a vu le danger-, d’un signe,il donne l’ordre
A Murat de charger...Dragons et cuirassiers
Brutalement s’élancent pour semer le désordre
Dans les rangs ennemis qui doivent se replier...
Embrasant le levant d’une lueur intense
Le soleil se lève au dessus du brouillard.
L’Empereur superstitieux y voit signe de Chance:
Ce Soleil est le sien, il brille pour sa gloire...
Cachés par ce brouillard qui, léger, se sublime
Au centre, Soult et ses troupes, massés dans la vallée,
Attendent, impatients. Enfin c’est l’ordre ultime:
Vingt cinq mille bonnets noirs montent vers l’épopée!!!
Et roulent les tambours!!!”Ce que nous allons rire!
Rantanplan!Rantanplan!On leur trouera le flanc”
Mais l’ennemi est là et de partout il tire,
Arrêtant un instant l’irrésistible élan
De ces vingt cinq mille hommes pour qui c’est jour de fête !!!
Et la Garde du Tsar -terribles cavaliers
S’élance sabre au clair, déclenchant la tempête,
Ecrasant les Français qui meurent à leurs pieds ...
Sur l’aride étendue c’est un affreux carnage.
Un moment le Destin semble changer de camp;
Mais les escadrons noirs de Bessières s’engagent
Epaulés des Mamelouks qui chargent en hurlant...
Leurs sabres recourbés, dans l’air, tournoient terribles,
Fauchant les têtes blondes des cavaliers du Tsar.
Dont les corps mutilés par des blessures horribles,
Traînent sous leurs chevaux qui s’enfuient au hasard...
Le plateau est conquis, la manoeuvre est parfaite...
Les Autrichiens au sud, pris sous les feux croisés,
Le long de la Goldbach, commencent leur retraite,
Poussés vers les étangs et les marais gelés.
Les canons de Davout se mettent en colère
Ils tirent, tirent encore, sur ces pauvres pantins
Qui sur la glace glissent et, suprême misère,
Se noient, tout en croyant échapper au Destin...
Ce n’est plus la retraite, c’est déjà la déroute...
De l’eau jusqu’à mi-corps, perdus dans les marais,
Les Autrichiens se rendent. Il n’y a plus de doute:
Le Saint Empire se meurt sous les coups des Français...
Koutousov, humilié, bedonnante silhouette,
Se retire en désordre, laissant, couverte de morts,
La campagne morave; et son regard s’arrête,
Comme désespéré, sur ces milliers de corps...
La fleur de la Noblesse gît là,sur cette terre,
A jamais massacrée. Tous ces beaux officiers,
Cadavres déjà froids dont Moscou était fière
Sont tombés comme tombent des soldats en papier...
La bataille s’achève...Les canons encore grondent
Poursuivant ce qui reste des régiments du Tzar,
De cette triste armée qui, dans la nuit qui tombe,
S’enfuie honteusement, sauvée par le brouillard...
L’Empereur alors fait taire les soldats qui l’acclament:
“Qu’on fasse le silence pour trouver nos blessés
Et qu’on leur donne à boire de cette eau qu’ils réclament
Et les ramène ici pour qu’ils y soient pansés.”
Roustan à son coté, il chevauche dans l’ombre,
S’agenouillant parfois au coté des mourants.
Et il entend gémir, râlant dans la nuit sombre
Tous ces soldats si braves qui partaient en chantant...
En ce jour de Décembre un nouveau monde est né.
Deux grands Empires vaincus, l’Autriche et la Russie,
Devant des Hommes Libres, ont du se prosterner...
Ce que d’autres ont tenté,”Lui”, il l’a réussi...
“Soldats proclame-t-il” vous avez décoré
Vos aigles d’une gloire qui sera immortelle!!!
Je suis content de vous” Mais le Temps est compté...
L’Angleterre déjà veut une guerre nouvelle...
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